Corey Heim : « Nous avons gagné en famille »

Fraîchement sacré champion 2025 de la NASCAR Craftsman Truck Series, Corey Heim est revenu en conférence de presse sur une saison exceptionnelle, marquée par la domination de l’équipe TRICON Garage et une finale de haute intensité à Phoenix. Dans cet entretien, le pilote de la Toyota n°11 partage sans détour ses émotions, ses doutes et les clés de sa réussite.

Corey, tu semblais particulièrement soulagé après ta victoire. À quel point la pression était-elle forte ces dernières semaines ?

Corey Heim : Oui, énormément. Je n’ai jamais ressenti quelque chose d’aussi intense. Lors de ma première participation au Championship 4, j’étais encore un peu naïf, simplement heureux d’être là. Mais l’an dernier, j’étais convaincu que c’était notre année… et on s’est pris une sacrée raclée.
Cette fois, on est revenus plus forts, en battant presque tous les records. Il y avait donc une énorme pression : ne pas décrocher le titre aurait été un échec malgré une saison exceptionnelle. Avec la meilleure équipe du garage, je me devais d’être à la hauteur. C’était écrit qu’on devait aller chercher ce titre.

Tu sembles avoir traversé des montagnes russes émotionnelles. Comment as-tu géré ces moments ?

C.H. : Honnêtement, j’avais beaucoup de doutes. En repartant dixième avec des pneus neufs à dix tours de la fin, tout pouvait basculer. Mais j’étais déterminé à donner une dernière chance à notre saison.
Scott (Zipadelli, le chef d’équipe) a pris la bonne décision stratégique avec quatre pneus. Je ne pensais pas qu’on serait aussi rapides, mais ça a tout changé. Sans ce choix, on n’aurait pas gagné.

Lors des redémarrages, tout peut arriver. Te sentais-tu confiant ou inquiet ?

C.H. : Franchement, je n’avais pas confiance en grand monde (rires). Après 2023, je savais que pour gagner, il fallait être à l’offensive, contrôler la course, ne pas subir. Partir avec quatre pneus était le seul moyen de garder l’initiative. Scott l’avait compris.
J’ai préféré partir du bas pour contrôler ma trajectoire plutôt que de dépendre des autres. C’est ce qui a fait la différence.

Certains ont évoqué un “astérisque” à ta victoire en raison de la stratégie. Que leur réponds-tu ?

C.H. : (sourire) Les gens parleront toujours. Mais on a dominé toute l’année, et on s’est mis en position de force. J’ai fait tout ce qu’il fallait pour être au bon endroit, au bon moment. Il n’y a pas d’astérisque quand on est performant du début à la fin.

Tu es le seul pilote à avoir mené au moins un tour à chaque course cette saison. Comment expliques-tu une telle constance ?

C.H. : En franchissant la ligne en premier ! (rires)
Plus sérieusement, ça montre le niveau de performance et de régularité de notre équipe. TRICON, Toyota… tout le monde a travaillé sans relâche. Fournir un Truck compétitif chaque semaine, c’est un exploit collectif. On a atteint un niveau qu’on n’avait jamais eu auparavant.

Revenons à tes débuts. En 2020, tu remportais ta première victoire en ARCA à Kansas. Peux-tu mesurer le chemin parcouru ?

C.H. : C’est complètement surréaliste. En 2019, mon père investissait tout ce qu’il pouvait pour que je continue à courir. En 2020, j’ai gagné à Kansas avec Venturini Motorsports, et ça a tout changé.
Toyota m’a ensuite fait confiance, et j’ai continué à progresser jusqu’à TRICON. Si on m’avait dit à l’époque que je serais champion Truck en 2025, je ne l’aurais jamais cru.

Tu n’étais pas satisfait du Truck après les essais. Qu’est-ce qui a changé avant la course ?

C.H. : Oui, après les essais, la maniabilité n’était pas bonne. On avait la vitesse, mais pas la tenue de route. Scott et l’équipe ont fait des ajustements parfaits avant la course, en anticipant la baisse de température et l’évolution de la piste. Leur travail a été exceptionnel.

Parle-nous de ce fameux redémarrage à sept de front. Que se passait-il dans ta tête ?

C.H. : Franchement, pas grand-chose (rires). J’ai juste agi par instinct. J’ai vu une ouverture en bas, j’y suis allé à fond. J’étais surpris de l’adhérence du Truck. J’espérais simplement que ça passe sans accrochage… et ça a marché !
C’était un moment complètement fou, mais ça symbolise bien notre saison : agressive, mais maîtrisée.

Comment as-tu progressé techniquement depuis 2023 ?

C.H. : J’ai énormément travaillé sur mes points faibles, notamment sur les circuits courts. J’ai passé du temps avec Trevor, Blake, et même avec 23XI pour analyser mes données.
J’ai aussi étudié Ty Majeski, qui est une référence sur ce type de piste. J’ai essayé de comprendre ce qu’il faisait différemment. C’est en apprenant des meilleurs qu’on progresse.

Le drapeau jaune en fin de course t’a offert une nouvelle chance de gagner. Comment as-tu vécu ce moment ?

C.H. : Sur le moment, j’étais partagé. Terminer deuxième me donnait le titre, mais j’avais aussi la chance de gagner la course. Finalement, ça a tourné en notre faveur.
Je repensais à 2023, où tout était parti en vrille. Cette fois, on est restés concentrés. C’est ce qui a fait la différence.

Ton chef d’équipe a souligné ton éthique de travail. D’où vient cette rigueur ?

C.H. : J’essaie d’être complet : en forme physiquement, mais aussi prêt mentalement et techniquement. Je passe énormément de temps à étudier les données, à travailler sur simulateur.
Quand on fait partie d’une équipe aussi performante, on n’a pas le droit d’arriver sans préparation. Je me sentirais coupable de ne pas donner le maximum.

Comment l’adversité t’a-t-elle façonné en tant que pilote ?

C.H. : On apprend surtout en perdant. Il faut vivre la défaite pour savoir comment gagner. Les revers m’ont appris à rester calme et à mieux gérer la pression.
Ce titre, c’est le résultat de toutes ces leçons accumulées depuis mes débuts.

En un mot, que représente cette saison pour toi ?

C.H. : La famille.
On a gagné ensemble, avec les mêmes gars depuis 2023. Scott a su créer un vrai groupe, uni et passionné. Tout le monde s’est dépassé. On a progressé ensemble. Je veux qu’on s’en souvienne comme ça : une victoire d’équipe, une victoire de famille.

Et pour finir : la Truck Series reste-t-elle, selon toi, un bon tremplin vers la Cup ?

C.H. : Absolument. C’est la catégorie la plus proche de la Cup en termes de pilotage et de comportement des véhicules. La Xfinity est différente, mais les Truck sont un passage obligé pour comprendre ce qu’il faut pour réussir au plus haut niveau.
L’environnement s’est assaini ces dernières années, et j’espère y avoir contribué