La FIA revoit (un peu) la place de l’IndyCar dans la pyramide vers la Formule 1
Le Conseil Mondial du Sport Automobile de la FIA a validé une évolution attendue depuis longtemps côté IndyCar : à partir de 2026, le barème de points de Super Licence accordé au championnat américain est revalorisé pour les places 3 à 9 du classement général. Objectif affiché par la FIA, selon le communiqué officiel : mieux refléter l’importance croissante de la discipline dans le paysage des monoplaces de haut niveau.
Concrètement, davantage de pilotes IndyCar seront éligibles à la Super Licence, indispensable pour décrocher un volant en Formule 1. Le seuil reste fixé à 40 points accumulés sur trois saisons, mais le nouvel équilibre rapproche l’IndyCar des séries estampillées FIA comme la Formule 2, même si l’IndyCar ne bénéficie toujours pas d’un traitement totalement équivalent.
Rappel : comment fonctionne la Super Licence FIA ?
La Super Licence a été mise en place pour éviter que des pilotes ne puissent acheter leur place en Formule 1 sans parcours sportif solide. Pour être éligible, un pilote doit cumuler au moins 40 points sur un maximum de trois saisons, en fonction de ses classements dans des championnats reconnus par la FIA, avec un barème propre à chaque série.
Jusqu’ici, ce barème favorisait clairement l’« échelle FIA » des monoplaces (F4, F3, F2) au détriment des championnats indépendants. L’IndyCar championne en titre offrait déjà 40 points, comme la Formule 2, mais derrière, la chute était beaucoup plus brutale côté américain. C’est ce déséquilibre qui avait fait exploser le débat au moment des tentatives avortées de Colton Herta, mais aussi de Pato O’Ward ou Álex Palou, d’accéder à la F1 faute de points suffisants malgré leurs résultats en IndyCar.
Le nouveau barème IndyCar : plus généreux du 3ème au 9ème
La décision du Conseil Mondial ne touche pas la tête de tableau :
- Le champion IndyCar reste crédité de 40 points, soit le maximum.
- Le vice-champion reste à 30 points.
La nouveauté concerne les positions suivantes, à partir de la saison 2026. Le barème IndyCar passe de :
- Ancien barème FIA : 40 – 30 – 20 – 10 – 8 – 6 – 4 – 3 – 2 – 1
à :
- Nouveau barème FIA : 40 – 30 – 25 – 20 – 15 – 10 – 8 – 6 – 3 – 1
pour les places 1 à 10 du championnat.
Autrement dit :
- 3ème du championnat : 25 points (au lieu de 20)
- 4ème : 20 points (au lieu de 10)
- 5ème : 15 points (au lieu de 8)
- 6ème : 10 points (au lieu de 6)
- 7ème : 8 points (au lieu de 4)
- 8ème : 6 points (au lieu de 3)
- 9ème : 3 points (au lieu de 2)
- 10ème : 1 point (inchangé)
Plusieurs rangs voient donc leur valeur purement doublée, ce qui limite le « trou » de reconnaissance entre l’IndyCar et la Formule 2, où les trois premiers du championnat touchent 40 points chacun, et où le top 10 est lui aussi très généreux.
Un pas vers la F1, mais pas une autoroute
Pour autant, cette revalorisation ne transforme pas l’IndyCar en voie royale vers la F1. Un titre IndyCar suffit toujours à atteindre à lui seul les 40 points. En revanche, terminer plusieurs fois dans le top 5 devient beaucoup plus rentable : un pilote qui enchaîne par exemple une 3ème, une 4ème et une 5ème place sur trois ans atteindrait désormais 60 points, contre 38 auparavant.
À l’inverse, un pilote plus irrégulier, typiquement 5ème puis 8ème puis 9ème du championnat, passerait de 13 points cumulés à 24 points. C’est mieux, mais cela laisse encore un gros volume de points à aller chercher ailleurs pour viser une Super Licence.
Racer souligne d’ailleurs que cette mise à jour n’aurait pas suffi à régler le cas Colton Herta sur la période qui avait fait polémique. D’après les calculs présentés, l’Américain serait resté à un point du fameux seuil de 40, même avec le nouveau barème appliqué à ses résultats IndyCar.
Herta a d’ailleurs choisi une voie plus classique pour 2026 : il quitte l’IndyCar pour la Formule 2, tout en occupant un rôle d’essayeur pour le programme Cadillac F1, avec l’objectif d’empocher au moins six points supplémentaires et verrouiller enfin sa Super Licence.
Un signal politique fort vers l’IndyCar et le marché américain
Au-delà des chiffres, cette décision de la FIA a une dimension politique évidente. Dans son propre compte-rendu, le Conseil Mondial explique que l’ajustement vise à « refléter l’importance croissante de la catégorie ». En clair : l’IndyCar est reconnue comme l’un des championnats de monoplaces les plus relevés au monde, à placer au même niveau que la Formule 2, la Super Formula ou la Formule E.
Ce rééquilibrage intervient aussi dans un contexte où la Formule 1 cherche à renforcer sa présence en Amérique du Nord, avec plusieurs Grands Prix aux États-Unis et l’arrivée annoncée de Cadillac en tant que motoriste. Faciliter – au moins marginalement – le passage d’un top pilote IndyCar vers la F1 est cohérent avec cette stratégie globale.
Pour les équipes de F1, l’IndyCar devient un vivier un peu plus accessible : un pilote solidement installé dans le top 5 du championnat américain n’aura peut-être plus besoin d’un long détour par la F2 pour atteindre les 40 points, surtout s’il combine ses résultats IndyCar avec un programme parallèle reconnu par la FIA ou des participations en essais libres F1.
Ce que cela change concrètement pour le paddock IndyCar
Côté IndyCar, cette évolution ne va pas bouleverser les grilles du jour au lendemain. La majorité des pilotes en place n’a pas une stratégie de carrière orientée F1, et certains profils comme O’Ward ou Palou ont déjà exprimé leur satisfaction de rester concentrés sur l’IndyCar.
En revanche, pour les jeunes pilotes visant une carrière internationale, le message est clair : une performance forte et régulière en IndyCar compte désormais davantage aux yeux de la FIA. Pour un rookie ou un talent venu de la Road to Indy, construire un palmarès solide en Amérique du Nord devient un chemin un peu plus crédible vers la F1, sans être relégué d’office derrière les pilotes issus de la seule pyramide FIA.
Enfin, cette mise à jour renforce la position de l’IndyCar dans la hiérarchie des championnats d’élite : la série reste indépendante, mais elle est mieux intégrée au « système FIA » et moins pénalisée dans l’accès à la Super Licence. Un compromis qui reconnaît la valeur sportive du championnat sans ouvrir totalement les vannes.
La prochaine étape, si débat il doit y avoir, pourrait porter sur l’alignement complet avec la Formule 2, ou sur la reconnaissance spécifique de certaines performances (victoires aux 500 Miles d’Indianapolis ou sur des ovales majeurs) dans le calcul des points. Pour l’instant, le paddock IndyCar se contentera d’un constat simple : dès 2026, un bon classement général pèsera plus lourd que jamais dans un CV présenté à une équipe de Formule 1.
